Par Linda Bouifrou.

Il est fort dommage que les oppositions de la municipalité de Créteil qui a annoncé «utiliser toutes les voies de recours possibles » [1] contre le projet du CABLE A[2], n’ait pas plus d’impact sur le tracé du Téléval (qui reliera Créteil à Villeneuve-Saint-Georges via Limeil-Brévannes et Valenton en une quinzaine de minutes). Et ce d’autant que l’association des riverains Sarrazins Sud [ASSC] a plutôt bien argumenté la contestation (document de 50 pages avec propositions de changements d’itinéraires).

La dynamique du Conseil Départementale y est certainement pour quelque chose, l’institution, œuvrant aux côtés du maître d’ouvrage du projet à savoir Île-de-France Mobilités (IDFM), s’enorgueillie effectivement de ce premier téléphérique d’Idf,  déclaré d’utilité publique (par la préfecture du VdM) notamment pour sa vocation à lutter contre la fragmentation urbaine, soit une forme de mesure de « justice sociale » pour corriger les enclavements. Argument que reprend en boucle  le collectif Vite le Téléval qui a lancé une pétition en ligne[3], rassemblant plus de 1000 signatures. Cette association a même participé ce weekend (du 14 décembre) à la fête des solidarités sur les sites de Limeil-Brévannes et Villeneuve-Saint-Georges[4].

Un transport pas si écolo

D’un point de vu écolo, de prime abord, le Téléval fait office d’une alternative pour augmenter la qualité des transports en communs, notamment en raison de sa non utilisation des énergies fossiles[5]. En effet, le Téléval est annoncé à la fois automatique et électrique et serait donc eco-friendly puisque sans émanation de gaz à effet de serre[6]. Mais l’association ASSC souligne, à juste titre, que la bétonisation, le déboisement et la diminution de terres agricoles, impacteront forcément sur la biodiversité. On sait déjà que pour les oiseaux, les câbles comme les éoliennes sont des dangers et des facteurs d’augmentation de la mortalité.

En réalité, la peur des résidents est d’abord liée à de potentielles nuisances sonores et à l’esthétique désagréable qui entravera le paysage qui sera, alors, traversé de câbles, de cabines  et de pylônes (une quarantaine au total sur le tracé). Les cabines pourraient frôler les balcons s’inquiètent certain.e.s, alors que le projet annonce une distance minimale de 20 mètres avec les bâtiments. Ces nuisances visuelles et sonores induites par cette proximité sont effectivement relevées et confirmées par la Mission régionale d’autorité environnementale d’Île-de-France (MRAE).

Un désenclavement des villes limitrophes que nous soutenons 

Force est de constater que le tissu urbain est déjà dense à Créteil, même dans cette partie nouvelle de la ville. D’ailleurs les habitants craignent, comme en témoigne Sabrina M., habitante du quartier et adhérente EELV, que la densification de la fréquentation du quartier pointe du lac, déjà nœud de convergence des transports (ligne 8 et divers Bus dont le 393 qui fait la navette entre les stations RER Sucy-Bonneuil et Créteil Pombadour) affect plus  encore la qualité de vie des habitants, notamment en terme de parking et d’engorgement des routes, particulièrement au niveau du rond point Europarc. Elle reconnait que ce sont certainement les propriétaires qui s’indignent de ce nouveau projet qui pourrait dévaluer le prix de leurs biens. Et finalement alors qu’elle avait choisi ce quartier pour bénéficier d’un peu plus d’espace et de tranquillité, elle se retrouve entre une station de métro (et de stationnement des métros), une myriade de bus, une voie rapide, un passage d’avions (en couloirs de déviation) tout l’été et jusqu’à récemment ! Alors l’idée de voir passer des cabines (« des œufs ») sous ses fenêtres ne l’enchante pas, évidemment !

On sait que ce projet ne servira pas la ville de Créteil directement sauf à apporter plus de monde au centre commercial diront les mauvaises langues, depuis Valenton et Limeil Brévannes (où passe le bus K). Mais c’est oublier que Créteil compte de nombreux équipements, outre administratifs (Préfecture, CAF, etc.), qui attirent ! Et au premier rang desquels la MAC (Maison des Arts) et surtout l’Université ! Alors au final on pourrait y voir une forme de solidarité de notre ville avec les villes voisines, notamment avec Limeil qui compte du même territoire (T11, GPSEA), mais comme l’a dit le maire de Créteil, Monsieur Laurent Cathala, en séance de Conseil Municipal (février 2019) : “On veut désenclaver des communes, mais on ne peut pas en fracturer une autre ou l’enclaver”.[7]

Pour EELV, l’idée de ce mode transport est intéressante uniquement dans des territoires peu urbanisés. Cette forme de mobilité est généralement utilisée comme un moyen plus rapide et efficace pour traverser une zone d’obstacles (forte pente, cours d’eau, etc.). Elle n’est pas appropriée à la situation de Créteil, et cette réserve que nous partageons à la fois avec l’association ASSC et la mairie de Créteil, ne préjuge pas de la nécessité d’être en solidarité avec les territoires enclavés et leurs habitants.

A lire pour en savoir plus :

https://94.citoyens.com/2019/enquete-publique-cable-a-televal-1er-telepherique-dile-de-france,24-03-2019.html

Le rapport : https://94.citoyens.com/wp-content/blogs.dir/2/files/2019/04/V7-20190419-Dossier-ASSC-Enquete-Publique.pdf

[1] http://www.leparisien.fr/val-de-marne-94/la-ville-de-creteil-deposera-des-recours-contre-le-projet-de-telepherique-25-10-2019-8180238.php

Et http://www.assc.fr/communique-de-presse-de-m-laurent-cathala/

[2] Projet de liaison par téléphérique urbain  par la Région IDF et le Département VdM

[3] https://www.change.org/p/viteleteleval

[4]https://www.facebook.com/ViteLeTeleval/photos/pcb.734077557102213/734074813769154/?type=3&theater

[5] Ce que font déjà les bus en site propre utilisant l’électricité ou le biogaz.

[6] L’association « Partage ta Rue » y répondra que ce qui consomme moins c’est évidemment plus de cheminements piétons, d’aménagements cyclables.

[7] https://www.ville-creteil.fr/cable-a-televal-oui-au-telepherique-non-a-son-trace-sur-creteil